samedi 8 septembre 2007

Chattaya raconte



Madame Thongthanom venait de libérer la classe. Tous les enfants se précipitaient dans la cour en piaillant. Il avait plu dans l’après-midi. Le sol était couvert de boue. Les garçons en profitaient pour éclabousser les filles. Les chemisettes passaient du blanc au marron sans que les mamans, tout juste débarquées des rizières voisines, chapeau de paille sur la tête et faucille à la main, n’interviennent ou ne grondent. Pour ma part, je préférais patienter quelques instants dans la classe, le temps que ça se calme. Pour ne pas salir ma chemisette, mais aussi dans l’espoir que Madame Thongthanom se change, quitte son uniforme officiel pour une tenue plus décontractée. Il n’en fut malheureusement rien. Bien que nettement à l’étroit dans sa chemise kaki, les boutons menaçant de rompre sous la pression de sa fabuleuse poitrine, mon institutrice ne s’autorisa aucun relâchement, garda jusqu’au bout sa panoplie de maîtresse d’école. Elle remarqua ma présence et m’invita à déguster une salade de papaye au pied du grand tableau noir surmonté des portraits du roi et de la reine.
– Attention, c’est piquant, m’avertit madame Thongthanom.
– J’ai l’habitude, maîtresse, ne craignez rien.
A l’époque, à l’exemple de tout un peuple, j’avais tendance à ingérer du piment sans compter. Mon cul pouvait être truffé d’hémorroïdes, ça ne nuisait aucunement à ma vie d’enfant de la campagne. Pêcher la crevette le long de la rivière, jouer à chat-fantôme dans la cour du temple et organiser des combats de boxe thaïe avec les copains n’empêchaient pas de manger épicé. Aujourd’hui, c’est un peu différent, je dois faire attention. La consommation de piments, dans mon métier, est plutôt déconseillée si l’on ne veut pas avoir de problème de santé.

Chattaya


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