mardi 16 octobre 2007

Chattaya raconte


Monsieur Jules s’était fait bel homme. Il portait une chemisette jaune 100% Thai silk, un pantalon à pinces beige – du genre facile à vivre – ainsi qu’une paire de boots imitation cuir avec fermeture Eclair sur le côté.

Handsome man ! Handsome man ! hurlèrent les copines.

C’est vrai qu’il était magnifique, mon homme !

You very good looking, tonigth. » lui glissai-je à l’oreille.

Le vieil homme posa ses lèvres sur ma joue. Il sentait bon l’after-shave. J’enlaçai sa taille de toute mes forces en cherchant à faire décoller ses pieds du sol: « Voulez-vous danser, grand-père ? » Un petit sourire étira ses lèvres.

Porom pom pero pero, libéra sa bouche.

Monsieur Jules affichait une mine resplendissante. Il m’avait réservée pour trois jours et semblait très enthousiaste à l’idée que je lui serve de guide. Il avait grassement payé la mamasang pour cela. Il ne me restait plus qu’à lui faire voir du pays : « Et si on commençait par gravir les 300 marches menant au monastère du Doï Suthep ? »

Je fus surprise d’entendre le portier de l’Ambassador converser en français avec Monsieur Jules. Où avait-il bien pu apprendre le français, celui-là ?

– En côtoyant les clients de l’hôtel, me confia le portier.

Couchait-il avec les clients ?

– Je parle aussi anglais, poursuivit-il. Je connais également quelques mots d’arabe et d’allemand. Je sais aussi dire Voulez-vous une jolie fille pour la nuit ? en japonais.

– Et le vieux, dans tout ça, il est quoi ?

Français, me glissa le portier.

La France était connue pour ses grandes marques : Yves Saint Laurent, Cartier, Vuitton, Chanel, Lacoste. Depuis de nombreuses années, la Thaïlande s’était spécialisée dans la contrefaçon de tous ces grands noms. Au village, par exemple, il était courant de croiser un paysan revêtu d’un polo Lacoste – à cinquante baht l’unité, pourquoi s’en priver ! Chez nous, d’ailleurs, le nom de Lacoste ne signifiait rien. Seul le petit crocodile cousu à hauteur de sein gauche avait son importance. Il était censé repousser les mauvais esprits. Voilà pour ce qui était de mes connaissances sur la France.


Chattaya


Aucun commentaire: