samedi 9 février 2013

Aéroport Suvarnabhumi, mon lieu de drague préféré


J’ai fait la connaissance de Panida – Da, pour les intimes – à l’aéroport international Suvarnabhumi. Elle ne raccompagnait aucun Jean-Pierre, Wolfgang ou Pierluigi à l’avion. Da venait d’enlacer amoureusement son père qui partait superviser un nouveau chantier à Doha. Se séparer de son géniteur, l’être qu’elle chérit le plus au monde, la rendait triste. Alors, comme j’ai pris l’habitude de le faire avec toutes les Thaïlandaises qui accompagnent leurs chéris occidentaux à l’aéroport, je me suis approché d’elle et lui ai tendu un mouchoir pour qu’elle sèche ses larmes.
Le niveau départ de l’aéroport est mon lieu de drague préféré. Les filles, qui reconduisent à l’avion leur chéri d’un jour, d’une semaine ou d’un mois, sont toutes plus émouvantes les unes que les autres. Elles ont fait la connaissance de leurs futurs époux dans les bars, les discothèques ou les salons de massage où elles officient, à Pattaya, cité balnéaire connue pour être la plus grande agence matrimoniale du monde. Elles pleurent toujours à chaudes larmes. Devoir quitter le farang providentiel qui les a amenées en avion à Phuket, les a faites dormir dans de grands hôtels (avec piscine en forme de haricot) et leur a offert le dernier scooter à la mode, les rend malades de chagrin. C’est là, alors, que j’interviens, un mouchoir en papier à la main, mon sourire ultra-bright à la bouche et, généralement, un début d’érection dans le slip : « La vie est faite de moments tristes, petite soeur, mais aussi de moments de joie. Je suis là pour te redonner le sourire. Une petite part de bonheur, ça te dit ? Mon cheval est garé au parking. En selle, poupée ! » Une fois sur deux, les filles finissent dans mon lit. Elles en oublient rapidement leurs chéris, me disent que je suis Superman, aimeraient jouer les prolongations, me quittent avec un pincement au cœur. Avant de dire au revoir à ces demoiselles, je leur offre mon petit cadeau habituel : une mignonnette de crème de cassis – qu’elles boiront pur, comme toujours, à la façon d’un vulgaire sirop pour la toux. Avec Da, par contre, ce fut une autre histoire. Mademoiselle n’a jamais officié dans un bar. Titulaire d’un master scientifique, elle est biologiste à l’hôpital Chulalongkorn. Son travail consiste à prélever des cellules souches sur des fœtus après une interruption volontaire de grossesse et d’en faire la culture en laboratoire. Il a donc fallu la jouer gentleman, être très patient et, bien sûr, prendre des gants pour que la jolie biologiste finisse dans mon lit, le tout dans un anglais impeccable – Da, qui a étudié deux ans à Londres, maîtrise la langue de Shakespeare à la perfection. Et vas-y que je te May I have, te could, te should, te would ! Moi qui commençais seulement à maîtriser l’anglais petit-nègre des filles de Pattaya, il a fallu que je me remette à utiliser le prétérit et le conditionnel : « Would you like to drink some cocktail before nightfall? » Ce « before nightfall », qui signifie « avant la tombée de la nuit », fut d’ailleurs beaucoup plus décisif que l’utilisation du conditionnel – en Thaïlande, un gentleman qui se respecte se doit d’inviter la demoiselle de bonne famille qu’il convoite à boire un verre avant la nuit tombée. Ensuite, surtout s’il est français, à lui de ne pas se mélanger les pinceaux avec l’emploi du prétérit : « Right, Miss Panida, which college did you go to? »

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