jeudi 11 octobre 2007

Chattaya raconte



     Le bateau avait pour nom George Best. Il était ancré dans le port d’Aberdeen au milieu d’embarcations d’un autre âge. Toutes aussi somptueuses qu’elles étaient, les jonques en bois ne faisaient pas le poids face à George Best. Sir Callaghan m’accueillit en personne au pied de la passerelle de son immense yacht. L’homme, de forte corpulence, n’était plus tout jeune. Il portait un magnifique smoking noir qui lui donnait un air de James Bond, en beaucoup moins svelte. Ne parlant pas l’anglais, je m’étais contenté de sourire à ce 007 bedonnant comme me l’avait suggéré Souris – Le sourire thaï n’a pas d’équivalent sur terre, rappelez-vous ! J’avais revêtu une robe de cocktail courte et moulante couleur rose bonbon dont le décolleté avait la particularité de se zipper et se dézipper à volonté, avis aux amateurs. Sir Callaghan était ravi de m’accueillir parmi les siens. Il m’entraîna sur le pont du navire au milieu de convives superbement ficelés. Chaque invité semblait participer à un concours d’élégance. Le maître des lieux m’introduit auprès de son épouse. Joli dessert chocolaté, dites-moi ! Je ne me rappelais pas avoir vu d’aussi jolies jambes. Finement joué, le coup de la minijupe en cuir ! En saluant la superbe Noire qui me faisait face et dont la gorge était couverte de brillants, je ne pus m’empêcher de l’imaginer avec un sexe d’homme. On peut toucher ? La seule idée que cette fille puisse avoir une bite fit se raidir ma queue au fond de la culotte. Le sparadrap se décolla aussitôt. Sans aucun scrupule, mon sexe prenait de plus en plus de hauteur sous ma robe. Cela frisait l’arrogance. Par chance, un invité de marque – je crus reconnaître Jackie Chan – se présenta au pied de la passerelle. Sir Callaghan s’excusa auprès de moi et, accompagné de sa ravissante épouse, alla accueillir le remuant acteur. Je réussis à m’éclipser sur le pont avant du bateau. Aucun couple ne s’était aventuré jusqu’ici ; il était encore un peu tôt pour y croiser des amoureux. Je plongeai aussitôt une main dans ma culotte, cherchant à y remettre un peu d’ordre. Mais rien à faire, ça bandait toujours aussi dur ! Un jeune homme fit alors son apparition. J’eus tout juste le temps de plaquer mon sexe sur l’une des bouées de sauvetage qui équipaient la rambarde. A mes pieds, la mer était d’huile, et d’un noir sans fond, glacé, funeste, un noir dont on ne revient pas. Lune ! Lune ! Où es-tu ?
     – My name is Gary, me lança l’adolescent.
     Etait-ce le fils de Sir Callaghan dont on célébrait le dix-huitième anniversaire ? Le garçon, d’une pâleur cadavérique, tenait une bouteille de Gin à la main. Sa bouche empestait l’alcool. Le temps du Fanta orange semblait révolu. Alors, Gary, ça fait quoi d’avoir dix-huit ans ?
     – I want to kiss you, me lança t-il, du jus d’escargot plein les lèvres.
     Somme toute, je n’avais qu’un an de plus que lui ! Et puis, pour ce qui est du jus d’escargot, tout le monde s’accorde à dire que c’est un très bon lubrifiant. Tu disais, Gary ?
     – I want to kiss you, répéta le jeune homme, mes deux pamplemousses à portée de fourchettes.
Gary avait les cheveux roux : le feu lui était monté à la tête. Je n’avais encore jamais vu de garçon aux cheveux orange ailleurs que dans un film américain. Le petit écolier rouquin qui y figurait était rejeté par tous les enfants de l’école. Ceux-ci lui donnaient régulièrement des coups de pieds au cul à l’heure de la récréation, lui jetaient des pierres au visage, le forçaient à manger des vers de terre. J’en avais simplement conclu qu’il n’était pas bon d’avoir les cheveux orange au pays de Marilyn Monroe, n’en parlons plus. Gary approcha sa bouche de mes lèvres. Il y déposa un baiser mouillé. La salive de rouquin, contrairement à ce que j’imaginais, n’avait pas le goût de terre. Je bandais toujours aussi dur, accrochée à ma bouée de sauvetage. Le baiser du jeune Callaghan n’avait pas arrangé les choses. Il fallait me rendre de toute urgence aux toilettes pour réprimer les ardeurs de mon sexe, quitte à envoyer la sauce une bonne fois pour toute. Gary, de plus en plus entreprenant, ne m’en laissa pas l’occasion. Il déposa un nouveau baiser mouillé sur mes lèvres. Je ne savais pas comment réagir. Etant payée pour sourire aux invités de Sir Callaghan, je ne me voyais pas finir accrochée à la queue de son fils. La chose n’était pas stipulée dans le contrat. D’un autre côté, je me disais que si le fiston était satisfait de la soirée passée en ma compagnie, il serait susceptible d’en parler à son père qui, ravi de voir son fils pleinement épanoui, pourrait peut-être me rétribuer en conséquence et faire que les 500 dollars se transforment en 1000, allez savoir ! En véritable adepte du marquage à la culotte, Gary apposa sa main sur mes fesses. J’avais une étoile de mer collée au cul. L’animal se nicha rapidement entre mes cuisses. Je n’eus pas la force – encore moins l’envie – de le repousser. Le visage du jeune homme se décomposa subitement. Gary avait-il aperçu un fantôme ?
     – I can’t believe it ! envoya-t-il au ciel, tout en retirant brusquement sa main de ma culotte comme s’il venait de s’y brûler.
     Ne t’inquiètes pas, Gary, mes testicules ne mordent pas ! Le jeune homme, démonté comme une mer australe, me balança illico par-dessus bord. « Aaaaaaaaaaaaaah ! » répandis-je mécaniquement dans la nuit hongkongaisela nage. Résultat : les noyés se comptent par centaines. « A moi ! A moi ! » Mes deux flotteurs pectoraux ne m’étaient d’aucun secours. Je suppliai les milliers d’étoiles parsemant le ciel de me venir en aide : « A moi ! A moi ! » Tu parles, elles se foutaient bien de mon sort, les étoiles, trop occupées qu’elles étaient à s’envoyer en l’air ! «C’est quoi, là, le truc qui me mord la jambe ?»


Chattaya


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